« État de droit » ou « état de droit » ?

Modifié par Clemni

Dans l'article 98-b du Bon usage, consacré au nom et à la majuscule, le grammairien Maurice Grévisse note que « la majuscule permet de distinguer une acception particulière d'un nom » et donne l'exemple du nom « État » qui, avec la majuscule, désigne « un pays particulier » ou « son gouvernement » ; alors naturellement que « état » signifie une situation ou une condition, comme dans les locutions « l'état de l'économie » ou « l'état de santé » d'untel.

Faut-il donc écrire – et penser – « État de droit », comme c'est le plus souvent le cas, ou « état de droit », comme on le rencontre plus rarement ?

Quoique ce soit largement affaire de convention, il faut néanmoins apprendre à distinguer deux choses :

  • « état de droit » devrait s'entendre comme dans les locutions « état de nature » ou « état civil », c'est-à-dire comme une manière de désigner la condition d'une société civile et de son appareil étatique (gouvernement, ministères, administrations, etc.), qu'il s'agisse par exemple d'une république, comme la France, ou d'une monarchie constitutionnelle, comme le Royaume-Uni. Ainsi, « état de droit » ne désigne pas la forme du gouvernement (présidentiel, royal, etc.), mais signifie que l'appareil d'État et toutes ses dépendances (la justice, par exemple, ou l'administration) fonctionnent selon un régime exclusivement juridique : c'est la loi et la loi seule qui est la règle de toute décision et de toute action ;
  • en revanche, « État de droit » signifie plus spécifiquement la reconnaissance par l'appareil d'État – gouvernement, administrations, représentants – de sa propre sujétion à la réglementation juridique. Il est ici question à la fois de la fondation juridique de l'appareil d'État, et de son fonctionnement, exclusivement dépendant des normes juridiques qui s'appliquent à l'ensemble de la société. Dans ce contexte, « État de droit » renvoie fréquemment à l'exigence de séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.

Si les locutions se confondent parfois du fait d'une graphie assez aléatoire (des organes de presse utilisent parfois alternativement « état de droit » et « État de droit » dans de mêmes articles ou sections d'articles), il est important d'apprendre à distinguer les nuances de sens que renferme la locution, quelle que soit la façon dont on l'écrit, et de toujours l'interpréter en contexte.

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
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